Consulter l’avis du HCSP
Présentation
L’avis commence en indiquant la légitimité du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) à s’exprimer sur le sujet. La SNANC comprend les enjeux de transformations de notre système alimentaire dont une partie portant sur la nutrition et l’exposition environnementale, domaine qui fait partie du champ d’expertise du Haut Conseil. En effet, ce dernier comprend les enjeux de santé publique. Par ailleurs, le HCSP demande également que ses avis soient davantage suivis. Cet avis reprend aussi des recommandations au niveau de l’activité physique, nous nous concentrerons sur les aspects nutritionnels.
Le Haut Conseil met d’abord en avant la représentation inégale des produits alimentaires avec une omniprésence des produits de moindre qualité nutritionnelle, généralement peu chers. Quant à eux, les produits de meilleure qualité nutritionnelle ont tendance à être plus onéreux et à ne pas jouir de la même visibilité. Pourtant les recommandations nutritionnelles ne cessent de promouvoir ces aliments sains : fruits, légumes frais, produits céréaliers complets et légumineuses.
Il convient de noter également l’importance des inégalités sociales, l’environnement nutritionnel est en effet davantage dégradé dans les quartiers les plus défavorisés.
Dans la lignée de rapports produits récemment, dont celui de l’IDDRI, le Haut Conseil préconise de faire porter l’effort de l’évolution de notre alimentation sur l’environnement nutritionnel plutôt que sur le comportement des consommateurs et consommatrices. Cela apparaît nécessaire pour lutter contre les maladies non transmissibles (maladies cardio-vasculaires, diabète de type II, certains cancers, etc.).
Il s’agit de faire en sorte que, par défaut, le choix le plus simple soit aussi le plus favorable à la santé, ce qui est le but des politiques publiques saines.
Avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’élaboration de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), 4 avril 2023.
Différentes mesures sont proposées par le Haut Conseil : la régulation de la promotion commerciale, les mesures concernant la taxation des produits ou leurs subventions, la mise en place de standards de référence pour la composition nutritionnelle des produits. Il apparaît nécessaire de tenir compte également des spécificités des départements et régions d’outre-mer.
Les différentes crises ont montré l’urgence d’une sécurité alimentaire, notamment pour lutter contre les inégalités sociales. L’accessibilité à des aliments sains est également une priorité. La vision d’une alimentation déconnectée des autres systèmes est dépassée. Il faut avoir une approche plus globale, telle que proposée par les perspectives “une seule santé” et “un seul bien-être” comprenant la santé humaine, animale et des écosystèmes, d’autant plus dans un contexte de changement climatique qui risque d’impacter négativement la production agricole et de creuser encore plus les inégalités sociales.
Notre modèle d’agriculture, reposant sur l’utilisation de pesticides et d’intrants chimiques, présente un risque pour la santé humaine via la contamination de nombreux milieux. Des nanomatériaux ainsi que l’utilisation de certains métaux sont aussi sources d’inquiétudes. Certaines pratiques plus vertueuses, comme le Bio, sont parfois indiquées. L’industrie agroalimentaire agit également en développant des pratiques plus respectueuses comme le vrac ou des démarches de type « clean label ». Ces éléments nécessitent cependant d’être plus transparents et encadrés.
Comme vu précédemment, réduire les inégalités sociales et territoriales de santé pour une alimentation plus abondante mais aussi plus saine et plus durable est primordial et est inscrit dans le Programme national de l’alimentation et la nutrition (PNAN). Différentes pistes ont été explorées (prix différenciés selon le revenu, programme d’assistance, extension de l’accès à la restauration collective, etc.) et méritent d’être synthétisées pour être étendues en cas de pertinence et en tenant compte des territoires. De même une sécurité sociale de l’alimentation est une piste à considérer.
Pour réduire la pente du gradient social de santé, les actions doivent être universelles, mais avec une ampleur et une intensité proportionnelles au niveau de défaveur sociale.
Avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’élaboration de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), 4 avril 2023.
Les différentes dimensions de l’alimentation doivent pouvoir être facilement accessibles par les consommateurs. La mise en place de labels est prometteuse avec la dimension nutritionnelle (Nutri-Score), la dimension de transformation/formulation industrielle (NOVA) et la dimension de l’exposition aux risques environnementaux (Bio). Concernant la durabilité, des indicateurs sont en cours d’évaluation. Il apparaît que ces labels devraient faire partie des différentes analyses. Dans ce contexte, si, par exemple, la mise en place des menus végétariens (aux impacts environnementaux favorables) a bénéficié d’une analyse nutritionnelle par l’Anses, il est sans doute regrettable que la question de l’ultra transformation n’ait pas été évaluée, ni l’exposition aux contaminants environnementaux. Ces différents critères peuvent être corrélés entre eux, ainsi la moindre qualité nutritionnelle des produits ultra transformés fait qu’ils ont très souvent un Nutri-Score dégradé.
L’agriculture représente l’une des principales sources de gaz à effet de serre au niveau national, contribuant ainsi à la crise climatique, alors même que la production agricole est l’une des premières activités affectées par son impact. Il en est de même pour la crise de la biodiversité. L’agriculture est l’une des premières sources de dépassement des limites planétaires au niveau mondial.
Avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’élaboration de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), 4 avril 2023.
Cela reflète l’importance de la SNANC et de la modification de nos habitudes tant alimentaires que de la production de notre alimentation. Les politiques publiques doivent donner des indications claires reposant sur une expertise scientifique.
Les trajectoires évoquées dans les accords de Paris et les Objectifs de développement durable (ODD) de l’OMS imposent, entre autres, des modifications importantes des comportements alimentaires des populations, vers des régimes comportant moins de produits d’origine animale et davantage de produits d’origine végétale.
Avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’élaboration de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), 4 avril 2023.
Pour aboutir à ces changements structurels d’une importance majeure, le HCSP appelle à avoir une expertise exempte de conflits d’intérêts. Il apparaît également nécessaire que les différents plans et stratégies se rassemblent.
La participation importante des opérateurs économiques à l’élaboration et à la mise en œuvre de la politique publique de la prévention de l’obésité et du surpoids implique l’existence de conflits d’intérêts.
Avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à l’élaboration de la Stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (SNANC), 4 avril 2023.
Axes définis par le HCSP
1. Renforcer les politiques publiques portant sur l’amélioration de l’environnement nutritionnel (alimentation et activité physique) ;
2. Assurer la sécurité alimentaire : une urgence pour lutter contre les inégalités sociales de santé en nutrition dans un contexte de crise climatique ;
3. Établir la convergence entre les différentes dimensions de l’alimentation dans une perspective durable ;
4. Mettre en place une gouvernance : un enjeu majeur de lisibilité et de cohérence pour la SNANC.
En résumé
L’avis du HCSP est qu’il est indispensable de faire évoluer notre alimentation et la politique agricole de la France vers des modèles plus sains, plus durables et plus égalitaires. Cela passe indéniablement par une végétalisation de notre alimentation et un développement d’une agriculture biologique. Il s’agit de considérer tous les aspects de l’alimentation. La valorisation des aliments végétaux comme les légumineuses dépassent la simple considération de la santé pour également aller vers une diminution de l’impact sur l’environnement et les animaux. L’omniprésence des acteurs agro-industriels dans les groupes décisionnaires est un obstacle non négligeable à ces évolutions nécessaires. Tous les indicateurs vont dans ce sens.