Accompagner la démocratisation des alimentations saines et durables

Assises territoriales de la transition agro-écologique et de l’alimentation durable 2024

Les lundi 2 et mardi 3 Décembre 2024 se tenaient au Corum de Montpellier les “Assises territoriales de la transition agro-écologique et de l’alimentation durable”. Cet évènement, dont c’était la 3ème édition, se veut une opportunité inédite d’approfondir et co-construire des “propositions autour des enjeux liés à la transition agroécologique”.

L’idée, c’est de rassembler et mettre en commun les travaux des acteurs·rices du foncier, de l’agriculture urbaine et péri-urbaine, de la logistique soutenable, des filières territoriales mais aussi de la restauration collective, de la nutrition, de la gestion des déchet ou de l’économie circulaire.

Cet événement proposait plusieurs formats pour un programme très complet

  • des conférences et tables rondes 
  • une place des marchés, avec des stands de producteurs·rices et animations
  • des ateliers (la co-construction évoquée précédemment)
  • des visites sur le terrain (comme par exemple, la visite de la cuisine centrale de Montpellier ou de la future maison de l’alimentation solidaire)
  • des posters
  • une soirée débat “manger comme on sème” avec comme invité·es : Perrine Bulgheroni (la ferme du Bec Hellouin), Salomé Saqué (journaliste et autrice), Laurent Cherchi (Reflets d’Obione) et Nicolas Bricas (socio-économiste de l’alimentation)

Focus sur l’intervention “regards croisés de 3 études : végétaliser et relocaliser la restauration scolaire

Cette intervention consistait en la présentation de 3 études et atelier participatif de co-création d’une stratégie territoriale pour soutenir une collectivité publique dans sa transition vers une végétalisation des menus.

Les intervenant·es étaient : Marjorie Constantin (LERASS et Ville de Montpellier), Justine Dahmani (INRAE et Ville de Dijon), Stéphanie Marmorat (Campus des Métiers) et Aurélien Thivent (CREATIV)

Etude n°1

Justine DAHMANI nous a présenté son travail de thèse qui portait sur “La transition vers une restauration scolaire plus durable, évaluation et mise en place d’actions : le cas de la ville de Dijon”

L’objectif de cette étude était d’évaluer l’augmentation de l’offre végétarienne sans altérer les dimensions de durabilité et en tenant compte des éventuels freins. Elle a donc porté sur 4 dimensions : 

  • assurer une bonne couverture des besoins nutritionnels tout en étant moins émetteur de CO2 que les plats avec viande et poisson, ce qui s’avérait être le cas.
  • l’appréciation des enfants : pas de différence entre les plats végé et les plats avec viande ou poisson (même si les plats avec oeufs et fromages avaient plus la côte que les plats à base de légumineuses).
  • évaluer le souhait des parents pour un deuxième repas végétarien hebdomadaire : il s’avère que 49% étaient favorables (26% pour une repas végétarien quotidien).
  • un programme d’éducation au goût “chouette cantine” qui a porté dans le cadre de cette étude sur les haricots rouges et le chou vert. Cela a permis d’augmenter la connaissance des enfants sur ces aliments, de leur donner envie de les goûter … même si finalement, ils n’ont pas forcément été plus appréciés !

Etude n°2

Etude sur l’impact d’une alimentation durable sur l’évolution des compétences des métiers, de l’offre de formation (de la production à la conso).

Les auteurices de l’étude ont conduit 43 entretiens avec les professionnel·les de l’ensemble de la chaîne (chef·fes de service, achat, production, diététicien·es, approvisionnement, cuisine, réchauffe, service, etc.), ce qui a permis de mettre en évidence plusieurs éléments qu’on peut retrouver dans ce document : Relocalisation de l’approvisionnement alimentaire et végétalisation des menus : Effets sur la restauration scolaire dans la Métropole de Dijon

Aurélien THIVENT, chargé de projet et co-auteur de l’étude, nous a présenté un focus sur les représentations sociales sur la végétalisation des menus et l’approvisionnement local en lien avec les organisations, les activités, les personnes, les ressources.

1- le poids des codes professionnels propres à la corporation est très marqué et influence la vision des personnel·les de cuisine sur leur métier : hiérarchie stricte et traditions culinaires immuables.

2- représentations et perceptions des agents biaisées : 

  • perception négative des méthodes de travail des autres services, de leurs collègues
  • mauvaise connaissance du travail des autres.

3- opinions variées sur les préférences alimentaires des enfants (biaisées par leur propres opinions)

  • produits locaux bien perçus (tradition)
  • produits bios “pour les bobo” (effet de mode)

Les enjeux mis en évidence (entre autres) révèlent le poids d’une société et d’une corporation très centrées sur la viande :

  • par l’influence culturelle : en gastronomie française, tout tourne autour de la viande
  • par la perception des agents qui influence les choix alimentaires des convives directement mais aussi indirectement (par ex : opinions et remarques négatives sur les plats végétariens lors de conversations anodines)
  • le lien entre “végé” et durabilité n’est pas évident pour les agents
  • les plats végé sont aussi perçus comme moins nutritifs que les plats avec de la viande (qui est assimilée à la bonne santé, la force)
  • autre influence socioculturelle : dans l’entourage des agents, il y a très peu de personnes végétariennes.

Etude n°3

Intervention de Marjorie Constantin, doctorante sur la thématique de la médiation des savoirs cuisiner auprès des enfants dans le cadre périscolaire.

Elle nous a présenté les beaux projets de la Direction de la Politique Alimentaire de Montpellier qui sont : 

  • le projet “ma cantine autrement” qui place l’enfant au cœur de l’innovation pour une restauration scolaire plus durable depuis 2016
  • la cité de l’alimentation qui verra le jour en 2026 avec une nouvelle cuisine centrale et un volet pédagogique à l’attention des enfants

Marjorie nous a cité en exemple de ses travaux une expérience qui avait pour but d’évaluer comment réagissent les enfants, après avoir été mobilisé·es et informé·es sur l’alimentation durable …

A travers la réalisation d’une affiche pour promouvoir le repas végétarien par 4 groupes d’enfants, celle-ci a pu étudier les dynamiques qui entrent en jeu : les influences à l’intérieur du groupe d’enfants pendant la réalisation de l’affiche, des adultes gravitant autour pour les aider dans leur tâche, mais aussi de leur milieu socioculturel, de leurs représentations des plats végétariens, etc. 

Ateliers de groupe

A l’issue de ces présentations très intéressantes, nous nous sommes séparé·es en 3 groupes pour échanger sur 3 axes : le point de vue des enfants, des parents et des professionnel·les de la restauration, dans le but de co-construire des “levier-actions”. Ces groupes ont permis de nombreux échanges de bonnes pratiques dans le but d’établir une liste d’axes de travail réalisables et pratiques pouvant être mis en place afin de lever les freins et faciliter la végétalisation des plats en restauration scolaire …

Le plus : le repas de mardi midi était préparé par la cuisine centrale de Montpellier, nous avons donc pu manger les mêmes plats que les élèves de la métropole à la cantine ce jour-là !


Les pois chiches FIBANI ont été cultivés dans la périphérie montpelliéraine et transformés par la légumerie Agrivia, une autre belle entreprise montpelliéraine.

Conclusion :

Un bel événement où je vous conseille de vous rendre si vous le pouvez et que vous êtes intéressé·e par tout ce qu’il est possible de mettre en œuvre collectivement quand il y a une vraie volonté politique de se diriger vers une alimentation plus durable.


Magali Chailloleau, Diététicienne et membre du Conseil Scientifique de l’ONAV

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